A Fosses : découverte d’un abysme à chandelles datant du XIIIème siècle
En 2010, la fouille d’une tessonnière* associée à un four de potier du XIIIème siècle situé près de l’église, au cœur du village de Fosses (18ème secteur de production) a livré un exemplaire de bac à chandelles (appelé «abysme» ou «abime»), ustensile en poterie commune utilisé pour la confection des chandelles dites «plongées» ou «à la baguette». A notre connaissance, c’est actuellement le plus ancien spécimen connu en Ile-de-France, et probablement au-delà.
Il a été récemment reconstitué, après un long et minutieux travail effectué par Muriel et Danièle à la Base archéologique pour rechercher ses fragments parmi des milliers d’autres tessons retrouvés dans le même contexte. Cette pièce exceptionnelle est décorée sur les deux faces avec des bandes appliquées et estampées au pouce. Sa longueur est de 537 mm, sa largeur de 45 mm, et sa hauteur de 260 mm. Elle sera publiée avec l’ensemble des céramiques associées dans la même séquence de production (notamment une magnifique série de pichets à décor plastique et glaçure polychrome) dans le troisième volume consacré aux découvertes récentes de nouveaux ateliers de potiers à Fosses et dans la Vallée de l’Ysieux.
Un abysme, comment l’utilise t’on ?
Il existe deux façons de fabriquer des chandelles, soit moulées (le suif est coulé dans des moules), soit plongées. Les chandelles plongées sont les plus communes. On les appelle ainsi parce qu’après avoir disposé un certain nombre de mèches à distances égales le long d’une baguette de bois, on les recouvre de plusieurs couches superposées, en les plongeant toutes à la fois dans l’abysme rempli de suif fondu. La première plongée se fait dans le suif très chaud afin que les mèches sèches y pénètrent bien droites.
La baguette est ensuite posée sur un égouttoir pour permettre à la première couche de figer. Pendant ce temps, le suif refroidit suffisamment dans le bac pour atteindre la température requise pour les plongées suivantes. Elles doivent se faire dans un suif légèrement refroidi pour ne pas endommager la couche initiale et pour que les couches suivantes ne soient pas trop minces. On dispose sous le moule une chaufferette ou «cassolette» remplie de braises afin de tenir le suif à un degré de fluidité convenable. La grosseur des chandelles dépend donc du nombre de plongées successives.
Danièle LAMBERT
* Tessonnière : il s’agit d’une fosse d’extraction de limon, progressivement comblée par le potier au fur et à mesure des défournements avec des rebuts de cuissons (céramiques brisées, déformées, ou présentant des défauts plus ou moins importants les rendant invendables). Voir à la rubrique publications : Fosses – Vallée de l’Ysieux, mille ans de production céramique en Ile-de-France, Volume 1, «Les données archéologiques et historiques».
Illustrations © JPGF
1 et 2 : Photos Christian Garcia
3 : Dessin Michel Cecchini.
4 : Gravure représentant un atelier de fabrication de chandelles sous l’Ancien Régime, extraite de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert, Paris 1760.
5 (ci-contre) : Photo Musée national des Arts et Traditions Populaires / MuCEM. Bac à chandelles du XVIIème siècle.